Ce n 'est un secret pour personne , j'adore Stephen King. Ses premiers best-sellers ont bercé mon enfance et mon adolescence, et les premiers films tirés de ses livres font partie de mes meilleurs souvenirs.
Ces dernières années, cependant, même si j'adorais retrouver son style, je dois avouer que ses histoires étaient bien moins intéressantes que par le passé. Parfois même, comme dans From a Buick 8 par exemple, mais surtout dans Lisey's Story, on le voyait s'essayer à une autre façon d'écrire, moins directe, plus alambiquée, comme s'il essayait de s' affranchir du style qui avait fait sa renommée pour séduire la critique. Alors que d'habitude je dévore ses plus gros pavés en un temps record, j'ai traîné Lisey's Story pendant plus de deux mois. Bien m'en a pris, car la deuxième partie est vraiment prenante.
Plus récemment pourtant, on a commencé à assister à un retour du "vrai" Stephen King. Duma Key était véritablement terrifiant et se lisait d'une traite, et même si Blaze n'était en fait qu'un roman oublié de l'époque où il se faisait appeler Richard Bachman, sa publication participait d'un effort pour retrouver les parfums d'antan.
Enfin, avec Under The Dome, on retrouve le grand Steve! celui du Fléau ou de Ca. Un livre choral, se déroulant dans une de ces villes du Maine que King se plait à créer pour mieux les détruire. Et pour cause: il s'agit une nouvelle fois d'un roman commencé dans les années 70/80, même s'il était loin d'être fini ( seules les 70 premières pages avaient été rédigées).
La petite ville de Chester's Mill ( à mi-chemin des tout aussi fictives Castle Rock et Tarker's Mill) se retrouve un beau matin d'automne isolée du reste du monde par un dôme aussi invisible qu'indestructible ne laissant passer que l'air (et un peu l'eau). Avions, hélicoptères et oiseaux s'écrasent contre la barrière, les traces de leurs impacts semblant flotter dans les airs. Les habitants se rendent vite à l'évidence: personne ne peut rien pour eux, ils sont livrés à eux-même. Mais si la plupart des gens sont paniqués à la perspective d'être ainsi emprisonnés, d'autant que la ville est désormais coupée de la centrale électrique et que les réserves d'eau et de carburant ne vont pas durer éternellement, d'autres y voient l'occasion de régler leurs comptes et de prendre le contrôle de la bourgade.
Le titre original, qui se traduit par "Sous le Dôme" est bien plus explicite que la traduction officielle ( "Dôme" tout court): l'enjeu majeur du roman n 'est pas l'explication de phénomène ( même s'il faut bien en parler de temps en temps), mais les réactions des habitants de la ville, observées comme celles de rats de laboratoires dans un labyrinthe. Stephen King joue sur ses points fort, car s'il n'a jamais été très performant lorsqu'il s 'est attaqué à la science-fiction, il est en revanche maître dans l'art de créer des personnages, et il croque ici une galerie de portraits des plus passionnantes. A mesure que la panique gagne, les caractères s'affirment, ou tombent en lambeaux; les statistiques d'agressions, de viols, de meurtres et de suicides grimpent en flèche. Le tissu social s'effondre, en quelques jours les habitants régressent au moyen âge, et la ville est bientôt divisée en deux factions rivales, le côté de la raison étant bien entendu le plus mal loti.
La variété des personnages permet à King d'aborder de nombreux thèmes et d'adopter des points de vue très différents. On parle droits, sécurité (voire sécuritarisme) religion, drogue, liberté de la presse, bref, tous les aspects de la vie de tous les jours sont abordés et passés à la moulinette.
Un point de départ intriguant, une nouvelle ville créée et détruite en quelques jours, des personnages suprêmement bien écrits, de l'action quasi non-stop, un suspense qui va crescendo pour atteindre des sommets, tous les ingrédients pour un bon gros pavé du King comme on les aime.
Morts en duo
Il y a 1 an