mardi 31 mars 2009

Les 3 Royaumes -John Woo




Comme beaucoup de ses compatriotes, John Woo s 'est un temps laissé séduire par les sirènes d'Hollywwod, mais même s'il a trouvé de l'autre côté du Pacifique un plus grand confort lors du tournage de ses films, il a beaucoup souffert de ne pas pouvoir monter les projets qui lui tenaient à coeur. Et pourtant il en a fait du boulot alimentaire, à commencer par son bizutage vandamesque (de Ringo Lam à Tsui Hark tous les réalisateurs Hong Kongais en sont passés par là).
Dernier en date à retourner dans le giron de la mère patrie, rétrocédée entre temps à la Chine, John Woo nous revient avec une fresque historique relatant l'un des faits d'armes les plus emblématiques de l'histoire de l'Empire Du Milieu: la bataille des falaises rouges.
Même s'il a connu la gloire grâce à ses films policiers, John Woo a touché à tout avant d'être connu, et il n 'est pas étranger au genre. De surcroît il bénéficie ici de moyens conséquents et de la coopération entière de l'armée chinoise qui lui a fourni d'innombrables figurants ( avec un peu de chance dans quelques années l'armée chinoise ne sera plus connue que pour sa participation aux peplums chinois, on peut toujours rêver).
Il était donc attendu au tournant, et le bougre ne déçoit pas!
La scène de bataille qui ouvre le film donne le ton: c 'est violent, c 'est grandiose, c 'est superbe et c 'est du John Woo pur jus! Les généraux sont de véritables super-héros, évoquant à la fois le Leonidas de 300 et les héros des premiers polars du réalisateur dans leur façon de massacrer la piétaille ennemie par paquets de douze, dans leur héroisme lorsqu'il s'agit de sauver un bébé et surtout leur façon de s'épauler mutuellement au coeur de la mêlée.
Pour autant, la valeur des généraux ne leur garanti pas la victoire, car ils ne font que couvrir la fuite des paysans.
La suite du film concerne surtout les tractations entre les personnages pour sceller des alliances et présenter les troupes absentes au premier affrontement, dont le formidable Tony Leung Chiu Wai, que Woo n'avait pas dirigé depuis Hard Boiled en 1992. Notre bonheur aurait été complet s'il avait pu reformer le duo de ce film mythique, hélas l'acteur chinois le plus médiatique du monde était retenu par ses engagements concernant l'adaptation de Dragon Ball. Il auraît peut être dû consulter l'agenda des films en préparation avant de signer.
Chow Yun Fat doit l'avoir bien mauvaise, d'autant que John Woo est visiblement en très grande forme. Ses thèmes de prédilection s'accordent parfaitement avec le contexte historique et héroique, le fait d'échanger les colts contre les épées ne le gêne absolument pas pour élaborer ses chorégraphies sanglantes (il parvient même à replacer son fameux "Mexican Stand-Off"), et il réinvente de fort belle manière son utilisation des colombes.
Le casting est impeccable: les nombreux généraux, parmi lesquels Takeshi Kaneshiro, le Sino-Nippon préféré du cinéma chinois, sont tous facilement identifiables à leur manière très particulière de se battre et Chang Chen, le jeune héros de Tigre Et Dragons, incarne avec la retenue et le charme requis le génial stratège Sun Quan, tandis que la lumineuse Lin Chiling illumine l'écran de sa grâce diaphane.
Le seul problème est que la version projetée en occident est en fait un condensé de deux films d'une durée de deux heures et demie chacun. Même si le charcutage ne se fait pas trop sentir ( à part dans la bataille finale où l'on passe tout de même très rapidement de la nuit noire au plein jour), je ne peux que m'élever contre cette pratique qui semble impliquer que le public occidental n 'est pas à même d'apprécier dans toute sa splendeur une fresque héroique chinoise, réalisée qui plus est par l'un des plus grands réalisateurs en activité, tous pays confondus.
Il ne reste plus qu'à espérer que les distributeurs rectifieront le tir lors de la sortie dvd/blueRay...

jeudi 26 mars 2009

The Chaser- Hong-jin Na

Joon-Ho est un ancien policier reconverti dans le proxénétisme. Suspectant tout d'abord que ses filles se font enlever pour être revendues, il se rend bientôt compte qu'elles sont en fait les proies d'un tueur en série, lequel est vite capturé, mais sa dernière victime est encore en vie quelque part. Une course contre-la-montre s'engage alors pour la retrouver avant qu'elle ne meure.


On le sait, depuis quelques années maintenant c 'est du Pays du Matin Calme que nous viennent les films les plus interessants du continent asiatique. Après la trilogie de la vengeance de Park Chan-Wook, après le délire westernien de Kim Jee-Woon, voici donc une énième variation sur le thème du tueur en série. Rien de bien oiginal au premier abord, sauf que le réalisateur prend ici le parti de la victime pour nous faire ressentir sa souffrance, au lieu de se focaliser, comme la plupart des films de ce genre, sur le face à face entre le monstre et la police. Ici le tueur n 'est pas un génie du crime, ce n 'est au contraire qu'un pauvre type impuissant qui ne s'attaque qu'à des cibles faciles, et s'il a pu faire de nombreuses victimes ce n 'est en aucun cas grâce à la supériorité de son intellect, mais bien à cause de l'incompétence de la police. D'ailleurs toutes les autorités en prennent pour leur grade dans le film, à commencer par le maire qui se fait copieusement asperger d'excréments. Le film évite tout manichéeisme, le héros n'étant au départ motivé que par le manque à gagner que lui occasionne la perte de ses filles. La seule figure positive dans tout celà est la victime que l'on voit se débattre pour tenter de sortir du piège où elle est retenue.
Un suspens qui parvient à nous tenir en haleine deux heures durant malgré la rapide capture du tueur, une violence parfois insoutenable, des acteurs d'autant plus identifiés à leurs rôles qu'ils sont pour la plupart inconnus ( à plus forte raison du public occidental), The Chaser est un film coup de poing qui laisse K.O une fois le générique de fin arrivé.
A celà s'ajoute l'atmosphère moite de l'été coréen, où les averses s'enchaînent sans dicontinuer, donnant au film un petit air de Seven.
Pour un premier film, c 'est un coup de maître. Hong-Jin Na, un réalisateur à suivre.

dimanche 22 mars 2009

C'est Le Printemps!


Samedi 21 Mars dans la fraicheur du matin ensoleillé, me rendant à petites foulées vers la citadelle, je remarque une agitation inhabituelle sur la place de la République. Des banderolles, des tentes, des ballons, des gens qui patientent devant une barrière... Mais bien sûr! Nous sommes le premier jour du printemps, c 'est aujourd'hui que sera distribué la nouvelle édition du Chti, l'indispensable guide de la métropole lilloise qui, depuis 36 ans, en répertorie absolument toutes les adresses utiles, des hôtels et restaurants aux administrations et commerces et associations
Je décide d'aller y faire un tour dans l'après-midi, pour le moment j'ai des calories à brûler.
Quelques heures plus tard, j'évolue au milieu des différents stands régionaux, ici on peut déguster des gauffres au chocolat, là on peut siroter un thé marocain, là encore un coin pour que les enfants se défoulent, plus loin certains vendent des t-shirts "Chti" tandis que d'autres encore perpétuent l'oeuvre de l'Abbé Pierre. Le Chti est gratuit, ou presque, contre une petite pièce on peut en prendre autant qu'on veut!
L'animation est assurée par une scène dressée devant le musée des beaux arts où se succèdent des chanteurs amateurs massacrant les classiques de la chanson internationale, leur prestation projetée sur un écran géant afin que le public ne perde rien du carnage.
Mon Chti en poche je n'ai plus de raison de faire souffrir mes oreilles davantage, et m'en retourne dans mon antre.

jeudi 19 mars 2009

Fast and vite passé


Mercredi 18 mars, ciel bleu, soleil, température agréable, on se croirait presque en été, et du côté du kinépolis l'atmosphère se réchauffe encore en début d'après midi: toute l'équipe de Fast And Furious 4 débarque pour l'avant-première française.A 13 heures l'espace entre l'Hipopotamus et le Kinépolis est déjà noir de monde. Sur les marches un présentateur tente de meubler en attendant l'arrivée des acteurs et du réalisateur du film tandis que défile en fond sonore la musique diffusée par la radio qui sponsorise l'événement, interrompue de temps en temps par le mix d'un dj installé sur le site. Je ne sais pas ce qui est le plus insupportable.La note kitsch est fournie par le groupe de pom pom girls qui vient régulièrement se trémousser devant le public, vraisemblablement au son des chansons figurant sur la B.O du film.
En parlant de B.O, un groupe de rappeurs français y ayant participé y va de son flow entre deux apparitions des majorettes.
Ultime tentative d'ameublement, les gagnants d'un concours quelconque débarquent de voitures tunées et montent les marches sous les huées du public.
Après plus d'une heure et demie d'attente, précédés par des vrombissements de moteurs et une odeur de gomme brûlée, les stars arrivent au volant de voitures outrageusement tunées. Michelle Rodriguez et Jordana Brewter très souriantes, Paul Walker et son sourire colgate qui font hurler les jeunes filles en fleur, mais où est donc Vin Diesel?
Alors que ses collègues se sont contentés d'un passage éclair devant le public avant de gagner le mini studio à l'intérieur du Kinépolis, l'éternel interprête de Riddick prend son temps pour signer des autographes, serrer des mains et prendre la pose auprès des fans. Lorsqu'il passe près de mon emplacement, les deux jeunes filles qui me bouchent la vue poussent des cris à faire exploser les vitres blindées de son bolide. Le temps d'appercevoir un coin de biceps et le sommet de son crâne rasé et c 'est fini, Vin Diesel monte les escalier et après un dernier salut de la main pousse la porte et disparait à l'intérieur du Kinépolis.
Je regagne ma voiture juste à temps pour entendre son interview à la radio.
Pour voir le film, il faudra encore attendre deux semaines.

jeudi 12 mars 2009

Who Watches The Watchmen?


Plus de vingt ans après sa parution, deux decennies de “developpement hell” après la sortie de son premier numéro, l’adaptation de l’oeuvre phare d’Alan Moore et Dave Gibbons prend vie sur les écrans du monde entier.
C’est un succès, aussi bien du point de vue économique que critique ( même si quelques voix discordantes, comme toujours, se font entendre), mais est-ce une bonne nouvelle pour autant ?
Que faut-il penser de cette tendance à adapter comics, mangas et bandes dessinées diverses à l’écran?
Certains argueront que là au moins « les images bougent », donc c’est plus facile à suivre, d’autres diront que la bande dessinée a de tout temps été la petite sœur du 7è art, ce qui sous-entend qu’elle lui est inférieure justifiant ainsi l’adaptation, d’autres encore que le récit touche ainsi plus de monde (on lit de moins en moins, de la bd comme autre chose), d’autres enfin, plus réalistes, diront que si une bd rapporte du fric, un film qui sera tiré en rapportera aussi !
Le raisonnement purement mercantile derrière ces opérations laisse de côté de nombreuses interrogations. Une œuvre, quelle qu’elle soit, ne devrait-elle pas se suffire à elle-même? La bande dessinée n’est-elle pas une forme d’art à part entière? A-t-elle besoin de répondre à l’appel des sirènes d’Hollywood pour exister? Le cinéma est-il à ce point en crise qu’il ne peut plus alimenter les salles qu’en cherchant l’inspiration ailleurs? Et surtout, une bande dessinée n’est-elle qu’un storyboard amélioré qu’il suffirait de suivre pas à pas pour en réaliser une adaptation fidèle ?
C’est en tout cas ce que semble penser Zack Snyder qui reproduit ici la recette appliquée au 300 de Frank Miller. En voyant le film on a vraiment l’impression que les cases se sont animées, mais cela fait-il forcément de Watchmen- le film un bon film, ou même une bonne adaptation?
Derrière chaque planche, derrière chaque case, derrière chaque trait du comic book de Moore et Gibbons il y avait une profonde réflexion sur la nature, l’histoire et la fonction du comic-book. Je doute fort qu’il en aille autant de chaque photogramme du film de Zack Snyder. Moore et Gibbons profitaient du format épisodique de leur bande dessinée pour se approfondir leurs personnages ; appliquée à un film de 2h45 cette technique donne une impression de pagaille narrative; on passe arbitrairement de la voix intérieure d’un personnage à celle d’un autre, et l’effet se rapproche de celui obtenu avec les films à sketches, peut être d’ailleurs Snyder aurait-il du davantage s’en inspirer. Enfin, à quoi bon évoquer de nos jours un 1985 uchronique, fruit de l’apparition du seul surhumain de la planète dans les années 60? Ne risque-t-on pas de perdre en route la majorité des spectateurs potentiels qui, dit-on, ne sont guère férus d’histoire?
Watchmen-Le Comic-Book, était une œuvre adulte, complexe, exigeante. Vouloir en faire un produit de consommation de masse est à coup sûr la dénaturer. La bande-annonce était déjà assez mensongère dans sa tentative de séduire les fans de films d’action. Le film lui-même va un peu plus loin en en rajoutant dans le gore et la violence, histoire d’appâter le chaland, et laissant de côté de nombreux aspects psychologiques.
Pour autant le film est loin d’être mauvais. La photographie est superbe, les acteurs excellents, la direction artistique irréprochable… Il est même beaucoup plus complexe que la plupart des films de super héros. Mais il doit toutes ses qualités à l’incroyable richesse du comic-book qui, même dénaturé, reste un véritable monument, mais certainement pas à Zack Snyder qui se spécialise de plus en plus dans les adaptations à l’image près et oublie de construire une œuvre personnelle.
Son succès est même son plus grand défaut, car les millions qu’il rapporte vont appeler d’autres adaptations du même tonneau, et comme de nos jours on peut véritablement tout faire au cinéma, je vois mal les producteurs se gêner.
Seulement être capable de faire n’importe quoi justifie-il qu’on doive absolument le faire ?

mardi 3 mars 2009

Des Loups Garous et des Hommes...


La sortie de Underworld 3 ( un film qu'il est bien sympa) est l'occasion de revenir sur les destins croisés de nos amis loups garous et vampires au cinéma.
Car si les vampires n'ont jamais été aussi choyés, il n'en va pas de même pour les lycanthropes. Il n'y a qu'à voir le nombre de films ayant pour sujet les suceurs de sang et ceux mettant en vedette des gens qui se transforment à la pleine lune pour s'en rendre compte: le loup garou n'a pas bonne presse.
Déjà, à l'époque où Lon Chaney se mettait plein de poils sur le visage, les vampires avaient déjà connu maintes adaptations cinématographiques. Pour les loups garous il aura fallu attrendre l'avènement du parlant ( sans doute une question de rendu des hurlements).
Les vampires sont les aristocrates du cinéma d'horreur, la créature maléfique par excellence. D'ailleurs ils habitent souvent de somptueuses demeures ( pas toujours bien entretenues il est vrai), sont immortels, ont des serviteurs qui veillent sur leur repos le jour venu, et surtout ils sont diablement sexy, ils dégagent un magnétisme animal qui bizarrement fait défaut à nos amis à poils. Ils sont le symbole de toutes nos pulsions refoulées, et principalement les pulsions sexuelles. Le sang c 'est la vie, mais c 'est aussi la marque du passage à l'âge adulte, à la vie sexuelle.
De son côté, le loup garou souffre d'une image de brute sans cervelle, victime d'une malédiction qu'il ne maîtrise absolument pas, c 'est la bête dans ce qu'elle a de plus primitif, et son existence est généralement très courte. Il est une telle image de la déchéance que dans la version Hammer Oliver Reed nait carrément loup garou après que sa servante de mère se soit faite violer et sequestrée dans un cachot pendant des années par un aristocrate. Certainement un vampire lui aussi d'ailleurs, c 'est peut être là l'origine des rapports entre lycanthropes et suceurs de sang tels qu'ils sont détaillés dans Underworld: les vampires qui commandent et les lycans qui vivent dans la servitude.
Ainsi, le mythe du loup garou aura été relativement ignoré, et les bons films du genre sont rares. Il faudra attendre les années 80 pour qu'une oeuvre se penche sérieusement dessus: Hurlements de Joe Dante change complétement notre perception du loup garou: désormais il n 'est plus soumis à la pleine lune, il peut se transformer quand il le veut, garde toute sa conscience même dans sa forme animale et possède de spectaculaires dons de régénération. Mais ce brillant exemple restera malheureusement bien seul, même si de nombreuses suites ont été données au chef d'oeuvre de Joe Dante, elles sont toutes affreusement nulles.
Récemment pourtant, avec le film canadien Ginger Snaps, une interessante parabole sur le passage à l'âge adulte a été réalisée. Ce thème avait déjà été exploité par le passé, mais uniquement sur le mode comique, dans I Was A Teenage Werewolf avec Michael Landon et le Teen Wolf avec Michael J Fox.
De leur côté, les vampires ont connu des centaines de variations, aussi bien en roman qu'à l'écran qui leur ont vallu maintes nouvelles jeunesses. Encore une différence de traitement avec leurs frères aux dents longues: les livres sur les loup garou sont peu nombreux, et aucun n'a eu le retentissement de la saga D'Anne Rice et encore moins du Dracula de Bram Stoker.
C 'est justement peut être de là que vient la différence de traitement entre les deux mythes: les vampires ont en Dracula un représentant mondialement celèbre, une tête d'affiche identifiable par tous, même ceux qui n'y connaissent rien au fantastique.
On attend donc le loup garou qui sortira les siens de l'anonymat...