Comme beaucoup de ses compatriotes, John Woo s 'est un temps laissé séduire par les sirènes d'Hollywwod, mais même s'il a trouvé de l'autre côté du Pacifique un plus grand confort lors du tournage de ses films, il a beaucoup souffert de ne pas pouvoir monter les projets qui lui tenaient à coeur. Et pourtant il en a fait du boulot alimentaire, à commencer par son bizutage vandamesque (de Ringo Lam à Tsui Hark tous les réalisateurs Hong Kongais en sont passés par là).
Dernier en date à retourner dans le giron de la mère patrie, rétrocédée entre temps à la Chine, John Woo nous revient avec une fresque historique relatant l'un des faits d'armes les plus emblématiques de l'histoire de l'Empire Du Milieu: la bataille des falaises rouges.
Même s'il a connu la gloire grâce à ses films policiers, John Woo a touché à tout avant d'être connu, et il n 'est pas étranger au genre. De surcroît il bénéficie ici de moyens conséquents et de la coopération entière de l'armée chinoise qui lui a fourni d'innombrables figurants ( avec un peu de chance dans quelques années l'armée chinoise ne sera plus connue que pour sa participation aux peplums chinois, on peut toujours rêver).
Il était donc attendu au tournant, et le bougre ne déçoit pas!
La scène de bataille qui ouvre le film donne le ton: c 'est violent, c 'est grandiose, c 'est superbe et c 'est du John Woo pur jus! Les généraux sont de véritables super-héros, évoquant à la fois le Leonidas de 300 et les héros des premiers polars du réalisateur dans leur façon de massacrer la piétaille ennemie par paquets de douze, dans leur héroisme lorsqu'il s'agit de sauver un bébé et surtout leur façon de s'épauler mutuellement au coeur de la mêlée.
Pour autant, la valeur des généraux ne leur garanti pas la victoire, car ils ne font que couvrir la fuite des paysans.
La suite du film concerne surtout les tractations entre les personnages pour sceller des alliances et présenter les troupes absentes au premier affrontement, dont le formidable Tony Leung Chiu Wai, que Woo n'avait pas dirigé depuis Hard Boiled en 1992. Notre bonheur aurait été complet s'il avait pu reformer le duo de ce film mythique, hélas l'acteur chinois le plus médiatique du monde était retenu par ses engagements concernant l'adaptation de Dragon Ball. Il auraît peut être dû consulter l'agenda des films en préparation avant de signer.
Chow Yun Fat doit l'avoir bien mauvaise, d'autant que John Woo est visiblement en très grande forme. Ses thèmes de prédilection s'accordent parfaitement avec le contexte historique et héroique, le fait d'échanger les colts contre les épées ne le gêne absolument pas pour élaborer ses chorégraphies sanglantes (il parvient même à replacer son fameux "Mexican Stand-Off"), et il réinvente de fort belle manière son utilisation des colombes.
Le casting est impeccable: les nombreux généraux, parmi lesquels Takeshi Kaneshiro, le Sino-Nippon préféré du cinéma chinois, sont tous facilement identifiables à leur manière très particulière de se battre et Chang Chen, le jeune héros de Tigre Et Dragons, incarne avec la retenue et le charme requis le génial stratège Sun Quan, tandis que la lumineuse Lin Chiling illumine l'écran de sa grâce diaphane.
Le seul problème est que la version projetée en occident est en fait un condensé de deux films d'une durée de deux heures et demie chacun. Même si le charcutage ne se fait pas trop sentir ( à part dans la bataille finale où l'on passe tout de même très rapidement de la nuit noire au plein jour), je ne peux que m'élever contre cette pratique qui semble impliquer que le public occidental n 'est pas à même d'apprécier dans toute sa splendeur une fresque héroique chinoise, réalisée qui plus est par l'un des plus grands réalisateurs en activité, tous pays confondus.
Il ne reste plus qu'à espérer que les distributeurs rectifieront le tir lors de la sortie dvd/blueRay...
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