Enfin! Enfin le nouvel album de Devin Townsend est arrivé! …et enfin, j’ai fini par terminer ma chronique!. D’accord, le précédent opus du Canadien fou ne remontait qu’à 2007, mais Devin nous a tellement gâté ces dernières années ( un album, voire deux par an) que tout délai est désormais vécu comme une torture par ses fans. Et pourtant le bougre n’était pas inactif, loin de là: il a fait un bébé avec sa compagne Tracy Turner, il a produit quelques groupes, il s ‘est mis à l’ébénisterie (!??) , il s ‘est construit un nouveau studio et surtout il s ‘est arrêté de boire et de fumer des joints… et il a accessoirement composé plus de 60 chansons! Celles-ci seront réparties sur les 4 (!!!!) albums qu’il compte sortir cette année et sur le coffret cd/dvd qui sortira l’année prochaine. Première livraison , donc : Ki. Autant vous prévenir tout de suite, ça n’a pas grand chose à voir avec ce que Devin avait l’habitude de nous proposer, que ce soit dans Strapping Young Lad ou dans ses projets solo. Fini le ‘mur du son ‘ cette production ‘mille feuilles’ qui faisait se superposer des dizaines de couches de guitares, de voix et de bruitages en tout genre qui composaient son son si caractéristique: la production de Ki est très dépouillée, pratiquement une piste par instrument et c ‘est tout. Même s’il ne peut pas s’empêcher de caser par-ci par-là des effets de synthétiseur ceux-ci sont très discrets. Ensuite, c ‘est de loin son album le plus calme. C ‘est presque un disque ’ Zen ‘. Même sur les morceaux les plus calmes qu’il avait composé jusqu’ici il n’était jamais arrivé à une telle impression de paix et de tranquilité. De fait, Ki contient sans doute les plus belles ballades qu’il ait jamais composées: Coast, Terminal et surtout Lady Helen sont à écouter alongé sur son lit ou son canapé, les yeux fermés; envol garanti. Rompant avec ses habitudes, Devin fait très peu de solos de guitare dans cet album, et les rares qui y figurent sont assez courts et déroutants, commençant dans un style pour en changer brutalement plusieurs fois. Mais calme ne veut pas dire soporifique: Ki est tout en contrastes, comme un parcours de montagnes russes, et aux moments calmes succèdent des moment plus agressifs et surtout de folie pure. L’album est centré majoritairement autour de la basse, ce qui lui donne un son très funky/ jazz, même si Disruptr sonne, lui, presque comme du doom, et surtout, pour la première fois Devin a engagé une vocaliste pour l’épauler sur certaines chansons, et le resultat est étonnant (ça vous étonne? ). Che Dorval, puisque c ‘est le nom de cette jeune fille que Devin a découvert alors qu‘elle était serveuse dans un resteau, possède un timbre tout en feeling et des capacités vocales à faire rougir de jalousie nombre de chanteuses renommées. Sa présence, tout d’abord discrète sur Gato, prend toute sa mesure dans le monstrueux Heaven Send, qui porte bien son nom, la clé de voûte de l’album, un morceau de presque dix minutes qui brasse des tonnes d’influences différentes, entre le funk, le jazz, le rock planant façon Pink Floyd et même des refrains hurlés à la façon de Strapping Young Lad, elle se permet même de conclure en solo Trainfire, le morceau le plus musicalement gai et malicieux de Ki, bâti sur un rythme de rockabilly sur lequel Devin se livre à une imitation très réussie de l’Elvis des débuts, chambre d’écho comprise. Le dernier morceau de bravoure est la chanson qui a donné son titre à l’album: Ki. Là encore c ‘est le contraste qui est roi. Après un début très Devin ‘classique’, on pense beaucoup à Infinity, puis à Enya ( dont le style d’arrangement, notamment au niveau des vocaux, est finalement très proche de celui de Devin), puis, après une montée en puissance qui n ’est pas sans rappeler Deep Peace, celà vire carrément à l’opéra, avec une performance vocale incroyable de la part de Devin. D’ailleurs il n’a jamais chanté aussi bien, quel que soit le registre, que sur cet album. Comme si en se libérant de ses gadgets il avait dû puiser dans ses capacités propres pour en sortir le meilleur. Ki est donc un album déroutant, exigeant, qui demande un bon nombre d’écoutes pour en apprécier toutes les subtilités, mais une fois que l’on se laisse pénétrer par sa beauté, c ‘est bien simple, on ne peut plus s’en passer, et surtout on ne peut qu’attendre impatiemment la suite. Heureusement cette année elle ne devrait pas trop tarder!
Morts en duo
Il y a 1 an