mardi 30 septembre 2008

TOTAL ... FOUTAGE DE GUEULE!

Je parlais récemment de l'imagination sans borne des publicitaires, mais plus insondable encore est le cynisme de certains de leur commanditaires.
Tout récemment un spot a débarqué sur nos écrans vantant les mérites d'une carte de paiement commercialisée par un grand groupe pétrolier tricolore. Le principe est le suivant: plus vous achetez avec cette carte et plus vous avez de réductions sur votre plein d'essence, à condition bien sûr de fréquenter les stations service de l'annonceur. A première vue cela part d'une bonne idée; l'augmentation du prix du carburant est une préoccupation majeure des ménages français, et toute réduction est la bienvenue.
Sauf qu'on se fout encore une fois bien de notre poire!
L'augmentation du prix du carburant n 'est que marginalement liée à l'augmentation du brut, il ne tenait qu'aux pétroliers de renoncer à une petite partie de leurs énormes bénéfices pour faire baisser les prix à la pompe, ou au moins à ralentir leur hausse. Sous couvert de faire faire des économies aux consommateurs , on leur colle un nouveau moyen de claquer du fric, on les incite à dépenser plus d'argent qu'ils n'ont pas pour aller en plus acheter de l'essence dans des stations qu'ils ne fréquentent pas habituellement puisque le prix du carburant y est largement plus cher que dans les supermarchés, même en comptant la baisse promise. Et je demande à voir si ce qui est promis sera effectivement accordé, et sous quelles quelles conditions (il y a toujours des conditions dans ces histoires là!).
Tout cela revient ni plus ni moins à exploiter la misère du peuple.

samedi 27 septembre 2008

THOMAS FERSEN : TROIS PETITS TOURS




Le petit dernier de Thomas Fersen est sorti à peu près en même temps que le Metallica, évidemment ça a fait moins de bruit ( au propre comme au figuré). En tant que fan du bonhomme cependant, même si je ne goûte guère la chanson française contemporaine , je ne pouvais passer à côté de l'événement.
Les deux derniers efforts studios du parisien m'avaient laissé sur ma faim. On y sentait comme un certain laisser-aller, une envie de se reposer sur ses lauriers, dûment gagnés du reste. L'écriture des chansons répondait un peu trop au shéma couplet/ refrain/ couplet, et même la musique semblait moins recherchée, du moins en ce qui concerne les orchestrations. J'avais toujours en tête son magnifique 4è album ( sobrement intitulé 4 ) qui fourmillait de perles telles que Monsieur, La Chauve-Souris, Le Moucheron , La Chandelle, bref pas une chanson qui ne sente le remplissage. En comparaison les deux albums suivants, Pièce Montée Des Grands Jours et Le Pavillon Des Fous me semblaient bien fades, même si de-ci de-là des petites perles émergaient, telles Deux Pieds ou Le Chat Botté ( et son refrain qui ne vous quitte plus de la journée une fois entendu: 'On ne veut plus les quitter quand on les enfile, essayer c 'est adopter les mules reptile..."), mais bon , comme disait l'autre " c'était mieux avant!"
J'enfournai tout de même la galette dans ma platine , car malgré tout le personnage m'est toujours très sympathique.
Le premier titre donne le ton: Germaine est le nom de sa valise. Car après avoir écrit de nombreuses chansons ayant pour personnage principal un animal , voilà que l'auteur s'interesse aux objets. Il nous narre donc par le menu la vie de son bagage, de sa naissance en Chine, en passant par les aéroports où elle est fouillée, reniflée par des chiens et finalement explosée par la brigade anti-bombes de New York. Deuxième chanson , deuxième objet: son Ukulélé. Depuis Pièce Montée Des Grands Jours ce petit instrument prend une place grandissante dans ses compositions, et il figure d'ailleurs sur tous les morceaux du présent album. Une fois encore ce sont surtout ses passages à la douane qui sont évoqués, la forme de l'étui de l'instrument rappelant ceux utilisés dans les films pour dissimuler une mitraillette. Heureusement il ne finit pas oublié dans un aéroport, puisque le musicien ne quitte jamais son "avorton de guitare". Chocolat, avec son chien inquisiteur, clos la série des chansons douanières sur une anecdote liée à un retour de Jamaïque. Suit une autre triade, de prime abord plus enthomologiste ( Formol, Punaise et Les Mouches), mais seule la dernière cause vraiment d'insectes ( il fallait bien qu'il y ait un titre animalier !). Le voyage reprend ensuite avec Gratte Dos, un objet très pratique et facile à caser dans une vallise, et Concombre, qui pour sa part s'interesse plus à la forme évocatrice des avions qu'aux cucurbitacés, même si Fersen ne peut s'empêcher d'y caser une référence aux lapins qui pullulent aux abords des aérogares. Il nous propose ensuite d'embarquer dans sa valise, mais quelque chose me dit que ce n 'est pas une bonne idée, d'autant que dans La Malle il nous avoue l'avoir égarée, et se retrouve apparemment avec celle d'une danseuse.
Au total onze chansons tendres et décalées, une invitation au voyage entre compte-rendu de tournée et fables surréalistes, onze témoins de l'imagination si particulière de Thomas Fersen et son point de vue unique sur les gens , les animaux et les choses qui l'entourent.
La musique est au diapason, dominée par l'omniprésent Ukulélé elle distille sa dose de malice et d'émotion pour mieux nous emporter, nous faire rentrer dans la valise et nous faire profiter du voyage.

mercredi 24 septembre 2008

METALLICA : DEATH MAGNETIC





On n'avait plus eu de nouvelles des Four Horsemen depuis le documentaire Some Kind Of Monster sorti en 2004 relatant la conception tumultueuse de l'album St Anger, depuis le départ du bassiste Jason Newsted ( qui avait rejoint la formation en 1986 , quelques semaines après la mort de Cliff Burton) jusqu'à l'arrivée du prodige Robert Trujillo ( Ex Suicidal Tendencies, Infectious Grooves, et dernièrement Ozyy Osbourne). Le moindre mérite de ce film ne fut pas d'éclairer sous un nouveau jour cet album des plus controversés et par là-même de lui accorder une certaine légitimité auprès des fans; après tout , au vu des événements relatés les fans pouvaient déjà s'estimer heureux d'avoir un nouveau Metallica à se mettre dans les oreilles, sa qualité en devenant presqu'anecdotique.
L'arrivée de Trujillo a rassuré les fans: bassiste surdoué et caméléon, discret l'homme semblait fait pour se fondre dans la formation californienne. Son intronisation montrée dans le documentaire le consacrait membre à part entière de la Famille Metallica. Le groupe avait retrouvé une unité qu'on ne lui avait pas connu depuis des lustres, et qui ne demandait qu'à être concrétisée par un nouvel album studio.
Quoi qu'ils restent bons amis, le groupe et son producteur historique Bob Rock ont décidé d'arrêter leur collaboration; c 'est désormais Rick Rubin, producteur d'artistes aussi variés que U2, Slayer, Johnny Cash ou Weezer, qui s'intalle aux manettes pour un opus que chacun espère plus "roots".
Et les fans n'ont pas été déçus!
Dès l'introduction de That Was Just Your Life, l'echo d'un coeur qui bat, le message est clair: la bête est encore vivante! et ce n 'est rien de le dire! Quelques harmoniques très Machine Head période Burn My Eyes et la voix rageuse de James Hetfield nous rassure immédiatement: le groupe n'a rien perdu de sa hargne , mais le son et la composition sont bien mieux maîtrisés que sur St Anger. Cet album est parti pour faire très mal! C 'est un Metallica à la fois fidèle à lui-même et plus violent que jamais qui revient. Les compositions semblent piocher volontiers dans le registre classique du groupe. On reconnait ici une rythmique issue de Master Of Puppets, des harmoniques de la période ... And Justice For All, des mélodies tirées de Ride The Lightning, et les "ran-cran-cran" caractéristiques du groupe depuis Kill'Em All mais ce qui surprend le plus c 'est le chant. James s'était attaché à partir du Black Album à développer son sens de la mélodie ( à part sur St Anger bien sûr), hors, s'il a encore l'occasion à plusieurs reprises de nous montrer qu'il est désormais un très bon chanteur ( notamment sur The Day That Never Comes, le premier single extrait de l'album, mais aussi sur Unforgiven III), il semble, surtout sur My Apocalypse, se rapprocher du phrasé et de la rage d'un Tom Arraya ( bassiste/ chanteur des furieux Slayer ), et même la guitare de Kirk Hammet nous surprend à sonner comme celle de Kerry King.
Lars Ulrich n 'est pas en reste, et celà faisait belle lurette que sa batterie n'avait été aussi sollicitée: descentes de toms et roulements de la double grosse caisse sont au programme lors des très nombreux changements et cassures de rythme qui structurent de longs morceaux à tiroirs "à l'ancienne".
Le livret annonce pour la première fois que la musique a été composée intégralement par les quatre musiciens, et Trujillo montre qu'il a su se faire une place au milieu de ses camarade, sa basse est bien présente et pas seulement en accompagnement des guitares ou de la batterie, quelques plages lui permettent de briller en solo, comme dans l'intro de Cyanide, le morceau joué lors du concert d'Arras.
Mais Death Magnetic ( que l'on pourraît traduire par " Attirant Comme La Mort") n 'est pas simplement un voyage dans les années 80, James &Co en ont fait une sorte d'oeuvre-somme qui, si elle fait la part belle aux classiques, ne renie pas pour autant leurs efforts les plus récents, aussi put-on trouver ça et là des réminiscences de Load et ReLoad, surtout dans le son, mais aussi certains plans à la St Anger, mais cette fois bien mieux maîtrisées. On y trouve même un instrumental de presque dix minutes Suicide & Redemption , le premier depuis To Live Is To Die sur ...Justice.
Death Magnetic parle bien sûr de la mort,de la douleur, du suicide, des thèmes chers à James Hetfield, ici unique parolier crédité, qui les a traités de nombreuses fois par le passé, mais jamais encore au point d'en faire un concept-album comme c 'est presque le cas ici. Pour autant ce n 'est pas un album triste, puisqu'il célèbre en grandes pompes le retour en forme d'une des plus grandes légendes du Metal.
Longue Vie à Metallica!

jeudi 18 septembre 2008

Terrorisme Publicitaire

Les publicitaires ne sont décidément jamais à court d'idées pour faire entendre le message de leur client.
Le téléspectateur, d'abord réticent aux écrans publicitaires ( je vous parle d'un temps que les moins de 30 ans ne peuvent pas connaître...), a fini, en bon représentant de l'espèce dominante sur terre, par s'y adapter. Loin de rester prisonnier de sa boîte à images dès lors que s'invitent les réclames, l'individu moyen met à profit ces quelques minutes de temps disponibles pour vaquer à toutes sortes d'occupations: l'un sort les poubelles, l'autre va se chercher un petit quelque chose dans le réfrigérateur, et bien d'autres encore s'en vont visiter le pipi room, tout ceci en prenant bien soin de pousser le son suffisamment fort afin de guetter la reprise de son programme préféré. En effet, le téléspectateur écoute plus qu'il ne regarde la télévision. Rien de surprenant en soit à cet état de fait: le foyer de tout un chacun n'a rien à voir avec une salle de cinéma. Lorsqu'il est chez lui, le télespectateur, même s'il aimerait qu'il en soit autrement, ne peut se dévouer entièrement à l'objet de son culte, occupé qu'il est avec la vie de sa maisonnée, surtout s'il vit en famille.
Les publicitaires ont dû de tous temps composer avec cette donnée, et rares sont les publicités totalement muettes, ne reposant que sur un argument visuel. Une bonne publicité c 'est surtout un slogan, voire une chanson, qui s'invite dans votre cerveau pour ne plus en sortir de la journée, voire de la semaine. On le voit , l'élément sonore est primordial.
Hors, une récente campagne de publicité pour une marque de voiture que je ne nommerai pas ici a révolutionné ce concept en misant justement sur le silence. Non pas que le spot en question soit muet, celà équivaudrait à un suicide commercial, mais une brève plage de silence total intervient à un moment stratégique, faisant croire au téléspectateur distrait que son appareil est défectueux, et le force donc à reporter son attention sur ce qu'il se passe à l'écran.
Je soupçonne cette campagne d'être à l'origine de petites tragédies domestiques. Imaginez l'amateur de football dans sa cuisine profitant de la dernière plage publicitaire avant le coup d'envoi pour s'approvisionner en bière et amuse-gueules divers tout en surveillant d'une oreille les sons provenant du salon. Soudain : silence! Le sang de notre amateur de sport ne fait qu'un tour: il ne pourra pas voir son match ! et à cette heure-ci il est trop tard pour aller le visionner chez un proche ou un ami, à moins de s'inviter pour la deuxième mi-temps! comme une furie il fait irruption dans le salon , prêt à montrer à ce tas de circuits qui c 'est le patron. Entre temps le son est revenu, tout va bien , mais la nervosité du chef de famille a jeté un froid sur le foyer. Je vous laisse imaginer ce qu'il advient lorsque le sportif par procuration est surpris aux toilettes ...
Le pire, c 'est que ces spots ne sont pas isolés: ils vont par trois! Aussi, à peine le téléspectateur est-il revenu de sa surprise qu'il subit un deuxième assaut, puis un troisième, l'obligeant à chaque fois à revenir en trombe s'assurer que son poste fonctionne, et chaque fois plus énervé que la précédente.
Et après ça il y en a encore pour protester contre la suppression de la publicité!

jeudi 11 septembre 2008

Mr ARKADIN (Confidential Report)- Orson Welles - 1955




Guy Van Stratten , un escroc de petite envergure, et sa petite amie Mily recueillent les dernières paroles d'un homme poignardé à mort, qui leur demande de le venger en faisant chanter Gregory Arkadin , un mystérieux milliardaire russe. Tandis que Mily se fait inviter sur son Yacht, Van Stratten entreprend de séduire la fille d'Arkadin, mais est bientôt repéré par l' "Ogre" qui lui propose un travail: enquêter sur sa vie. Arkadin prétend en effet ne rien se souvenir avant un jour de 1927 où il s 'est retrouvé en possession d'une valise pleine de billets avec lesquels il a bâti sa fortune. L'enquête de Van Stratten le conduit autour du monde, de Paris à Mexico en passant par la Pologne et le Maroc, mais il se rend bientôt compte que ses interlocuteurs successifs disparaissent les uns après les autres...

Désormais installé en Espagne , où il a fait la connaissance de Paola Mori , qui sera sa dernière épouse, Welles décide d'adapter pour le cinéma quelques histoires inspirées par Harry Lime, le personnage qu'il joue dans Le Troisième Homme, et qu'il avait mises en scène à la radio. A cet effet il développe un personnage secondaire, Arkadian , qui deviendra Arkadin, et qu'il interpétera. Il en fait un milliardaire russe , père d'une jeune et jolie fille appelée Raina ( Paola Mori) qu'il surprotège et fait surveiller nuit et jour par ses " secrétaires", menant grand train, donnant des fêtes fastueuses à bord de son yacht ou dans son château en Espagne.

Il trouve un producteur et s'entoure d'acteurs solides ( Akim Tamiroff, Mischa Auer, Peter Van Eyck, Suzanne Flon et même Gert Fröbe, futur Goldfinger!). Le tournage, qui mène la troupe d'Espagne en Allemagne en passant par la France se déroule sans incident notable ... c 'est ensuite que les ennuis commencent!

Louis Dolivet, le producteur, trouve que Welles met trop longtemps à monter son film , et décide d'user de son privilège de financier pour l'expulser de la salle de montage. Dès lors, la structure toute en flashbacks voulue par Welles passe par la fenêtre, le film devenant très linéaire à une exception près.

Welles dira que Arkadin aura été de tous ses films celui qui lui aura le plus échappé, celui qui aura le plus souffert de l'ingérence de la production, plus encore que Les Ambersons! De fait il en existe de multiples montages ( au moins cinq recensés avec certitude), sans qu'aucun n'ait eu l'aval de son réalisateur.

La fureur de Welles a sans doute été amplifiée par le fait qu'il s'était particulièrement impliqué dans ce projet; tout d'abord c'était seulement la deuxième fois qu'il signait un scénario original ( la première fois ayant été pour Citizen Kane ) , ensuite Arkadin semble être un véritable film somme de son oeuvre : le sujet rappelle bien sûr Kane, les scènes de fête traditionnelles évoquent sa façon de filmer le carnaval de Rio pour It's All True, l'atmosphère européenne d'après guerre évoque bien sûr Le 3è Homme mais aussi Le Criminel ( surtout lorsqu'on découvre les agissements passés d'Arkadin ) les relations quasi-incestueuses entre Arkadin et sa fille ainsi que le yacht rappellent La Dame De Shanghai ( où jouait la précédente Madame Welles!)

En l'état Mr Arkadin reste tout de même un film de Welles immédiatement identifiable à ses éclairages et ses cadrages , l'histoire est très prenante, les acteurs, comme toujours excellents, donnent vie à des personnages plus pittoresques les uns que les autres ( mention spéciale à Akim Tamiroff, acteur Géorgien que Welles engagera de nouveau pour La Soif Du Mal , Le Procès et son Don Quichotte inachevé), mais il souffre du montage sauvage effectué sur ordre de Dolivet, ainsi les faux raccords abondent, le son n 'est pas toujours bien calé et des prises où le maquillage de Welles est très visible voire défectueux ( son fameux nez!) ont été utilisées , et l'on se met à rêver de ce qu'auraît donnée la version de Welles.

Mr Arkadin est l'archétype du film maudit, arraché à son créateur, monté à la serpe et jeté en pâture aux exploitants, un joyau mal taillé mais d'une beauté envoutante, fascinant autant par son aspect gauche et rugueux que par l'aura de ce qu'il auraît pu être.

mardi 9 septembre 2008

Moules-Frites / Murray-Federer

La braderie de Lille, la fête nationale des moules-frites et des bradeux de tous horizons, s 'est tenue ce week end sous le soleil de ch'nord.
La braderie c 'est d'abord une rumeur, une voix au mégaphone qui entre par la fenêtre, des musiques mélangées qui se superposent, les sirènes des pompiers secourant les premiers comas éthyliques. La braderie c 'est aussi des odeurs, kébabs, merguez et bien sûr moules-fites proposés par des professionels ou des amateurs. Mais la braderie c 'est surtout la foule qui se presse dans les rues du centre-ville. Toute l'Europe semble être descendue dans la capitale des Flandres en quête de la bonne affaire , ou simplement pour profiter de l'atmosphère. Ces dernières années des efforts ont été faits pour faciliter la circulation du public, des axes ont été reservés, les carrefours sont libres, bref on respire un peu plus. Mais se faire écraser les pieds et piétiner pendant des heures c 'est aussi ça la braderie! La manifestation est quelque peu victime de son succès et les particuliers cèdent peu à peu le pas aux professionnels. Mais il est encore possible de retrouver l'esprit de la braderie, paradoxalement juste à côté de la foire aux manèges: c 'est là , au bord du canal qui enserre la citadelle construite par Vauban, que bat le coeur de cette institution lilloise. Là on peut encore, une bière à la main, déambuler entre les étals de fortune des passionés, discuter du prix d'une VHS usagée, fouiller à pleines mains dans des cartons à bds, s'émerveiller en retrouvant les meubles de notre enfance, tout en changeant d'ambiance musicale à mesure que l'on avance sous les frondaisons.

Mais ce week end c 'était aussi la finale de l'US Open de tennis!
D'abord prévue dimanche elle n'a pu avoir lieu, pour cause d'intempéries, que lundi soir. Un Federer ressuscité rencontrait le tombeur de sa bête noire sur le central de Flushing Meadows. Le suisse avait bénéficié d'un jour de repos supplémentaire, ayant terrassé le serbe Djokovitch en demi-finale avant la venue des intempéries, et Murray disputait là sa première finale de Grand Chelem. La victoire semblait promise à l'ex numéro un mondial, assuré cette fois de ne pas rencontrer Rafael Nadal en finale.
Souvent crispé face à l'espagnol, Federer a semblé ici plus détendu que jamais, lâchant des coups fabuleux avec une facilité déconcertante. Le premier set fut expédié en un peu plus de vingt minutes.
Dans la deuxième manche Murray reprit du poil de la bête et prit même le service de Federer. Le match semblait s'équilibrer, mais le suisse fit le break au moment opportun pour s'imposer 7/5.
Le troisième set fut le dernier. Federer se détacha rapidement , et Murray frisa l'humilation du 6/0, mais le suisse se contenta de gérer son avantage pour finalement s'imposer en moins de deux heures.
En inscrivant son 13 è succès en Grand Chelem Roger Federer vient non seulement de se relancer dans la course au record de Pete Sampras, mais surtout de démentir toutes les rumeurs sur sa soit-disant fin de carrière qui ont suivi sa défaite en finale de Wimbledon face à Rafael Nadal. De nombreux critiques n'ont vu que les défaites de l'ex numéro un mondial , occultant le fait qu'il avait tout de même atteint les demi finales en Australie alors qu'il était malade, et la finale à Paris et Wimbledon. Même s'il est indéniable qu'il souffre d'un "complexe Nadal", le taureau de Manacor n 'est pas non plus invincible, et une fois celui-ci éliminé du tableau plus personne n 'est en mesure d'arrêter le Bâlois.
Une chose est sûre, l'année 2009 promet d'être passionante!

Bref, un sacré bon week end!

jeudi 4 septembre 2008

Othello - Orson Welles - 1952


Othello, un « noble Maure » tout juste marié à Desdémone, s’apprête à affronter les Turcs, à la tête de la flotte vénitienne. Par chance, les navires turcs ont été détruits par une tempête, et Othello est nommé gouverneur de Chypre. Iago, qui convoitait la place de second d’Othello, échue à Cassio, tient le Maure de Venise pour responsable et décide de se venger de lui.

Sur le tournage de Cagliostro Welles rencontre à Rome un producteur Italien admirateur de son oeuvre qui lui propose de produire son prochain film. Welles décide de se lancer dans l'adaptation d'Othello, autre grande tragédie de William Shakespeare.

Pour une fois les choses semblent bien engagées, mais Welles est obligé d'interrompre le tournage à peine celui-ci commencé faute de fonds.Commence alors pour le réalisateur une épreuve de plusieurs années , au cours desquelles il se démènera aux quatre coins du monde pour trouver de nouveaux producteurs et acceptera de tourner à peu près tout et n'importe quoi afin de réunir l'argent qui lui permettra de terminer son film... et accessoirement de chaparder des costumes qu'il recyclera dans sa production .
Ne pouvant bien entendu pas faire patienter ses acteurs pendants les longs mois que peuvent durer les interruptions de tournage, il est obligé de se débrouiller avec ceux qui sont libres au moment où il a de l'argent, recourrant à des doublures filmées de dos, encapuchonnées ou dissimulées dans l'ombre pour figurer les acteurs absents, qui à leur tour reprendont leur rôle face caméra lorsque les circonstances les y raméneront. Ainsi il se passe parfois des mois voire des années entre le tournage de deux répliques.

Certains acteurs verront même leurs voix doublées par d'autres afin que leurs personnages puissent déclamer l'intégralité de leurs dialogues. Très peu de plans ayant été tournés en studio, et devant l'impossibilité de reserver un plateau , Welles décide d'utiliser au maximum des décors naturels, ce qui le contraint à déménager régulièrement son équipe, de Venise au Maroc, en passant par Malte.

Les aléas de la production seront même à l'origine d'idées de mise scène de dernière minute qui s'avèreront géniales, comme lors du tournage de l'assassinat de Roderigo où , la livraison des costumes ayant pris du retard, Welles décida de transférer la scène aux bains turcs!

Ce tournage cahotique a bien évidemment laissé des traces, le montage est très "cut" pour un film de cette époque ( d'autant que Welles adorait les plans séquences), alternant les plans où tous les acteurs concernés étaient présents avec d'autres où certains étaient absents , afin de donner l'illusion que tous les personnages interviennent bien, le tout lié par les voix ajoutées en post synchro.

Othello est l'exemple type ( et extrème) du cinéma de Welles hors Hollywood: produit pratiquement sans aucun autre moyen que les cachets d'acteurs de son réalisateur, fait de bric et de broc, filmé quand il y avait de l'argent, avec les acteurs présents, le tout prenant alors véritablement forme sur la table de montage et de mixage, il reste cependant considéré par beaucoup comme un chef d'oeuvre du cinéma.

Le film fut présenté au festival de Cannes en 1952 sous le drapeau marocain. Il auraît pu représenter la France ( la production multicéphale du film incluait des fonds français, espagnols, marocains et américains) , mais le film étant en langue anglaise ( normal, bande de nazes, c 'est du Shakespeare!!!) le comité français de sélection a décidé qu'il ne saurait en être ainsi. Et voilà comment le Maroc ( qui n'avait pas ce genre de scrupules) a eu droit à son premier grand prix à Cannes ( pas la palme d'or , mais quand même!) .

mardi 2 septembre 2008

MACBETH - Orson Welles - 1948

Dans l'Ecosse médiévale, Macbeth, un chevalier parmi les plus fidèles à son roi, croise sur sa route après une bataille décisive un trio de sorcières qui lui prédisent qu'il sera roi. Perturbé par cette rencontre il en fait part à son épouse, Lady Macbeth, qui le pousse à accomplir sa destinée, quitte à lui donner un petit coup de pouce, en tuant le roi par exemple. Devenu souverain , Macbeth, rongé par le remord, sombre peu à peu dans la paranoia et la folie, et se conduit de plus en plus en tyran sanguinaire.




Définitivement grillé à Hollywood après les echecs successifs de tous ses projets personnels, Welles fait le tour des petites compagnies pour produire sa première adaptation cinématographique de William Shakespeare, en grand admirateur qu'il est du Barde de Stratford ( il était acteur et metteur en scène de theâtre depuis l'adolescence).

C 'est finalement auprès de la Republic, spécialisée dans les westerns, films d'horreur et serials à petit budget qu'il trouve un (modeste) financement.

Entouré d'une équipe d'acteurs de theâtre chevronnés ( Parmi lesquels on retrouve Roddy "Cornelius" Mc Dowall et Daniel O'Herlihy, le patron de l'OCP dans Robocop) qu'il a longuement fait répêter en amont du tournage pour s'assurer qu'il connaissent leur texte par coeur, équipé de costumes récupérés par-ci par-là, dans des décors pas vraiment adaptés à ce qu'on attendrait d'une pièce shakespearienne, Welles tourne en 21 jours, en exploitant tous les éléments à sa disposition pour au final livrer une vision très personnelle de Macbeth, qui , une fois de plus, déconcertera le public ( du moins le public anglo-saxon).

Et pourtant ses choix étaient tous plus que judicieux, à commencer par les décors de films d'horreur, représentant à merveille le paysage mental torturé du personnage principal , ainsi que la sauvagerie de l'histoire, ce que soulignent aussi les peaux de bêtes qui habillent les acteurs, donnant au film une apparence de récit du début des âges.

Les plus vives critiques, cependant , concerneront l'accent écossais utilisé dans le film , ce qui peut paraître logique , puisque l'action est censée se dérouler au pays des Lochs, mais le public américain , ainsi que la critique, habitués aux adaptations "classiques" de Shakespeare ( genre Lawrence Olivier) considèrent cela comme une trahison de leur dramaturge emblématique.

Qu'arriva-t-il après la première mondiale? ceux qui ont répondu " Welles fut obligé de remonter et de couper son film " gagnent un mars!Welles remonta lui-même ( pour une fois) son film , coupant certains passages qui avaient indisposé les spectateurs, et rappela ses acteurs pour post-synchroniser à nouveau le film, avec un accent plus "shakespearien". C 'est dans cette version que le reste du monde a pu découvrir le Macbeth de Welles, qui était déjà magnifique en l'état. Mais même ainsi le film fut froidement reçu aux USA et en Angleterre, alors que pratiquement partout ailleurs où il fut montré il reçu des critiques élogieuses, chacun s'accordant à souligner la maîtrise technique de l'oeuvre malgré son budget de misère, les choix judicieux de mise en scène , d'éclairages, d'utilisation du décor et de la brume ( originellement utilisée pour masquer le manque de décors , mais qui s'accorde bien avec l'ambiance générale du film), ainsi que les décisions de Welles concernant le texte lui-même: création de personnages n'apparaissant pas dans la pièce, répliques échangées entre certains personnages ( chose qu'il faisait déjà au theâtre par ailleurs, mais le public du cinéma n 'est pas le même que le public du theâtre et supporte moins facilement ce genre de "trahison").

Macbeth marque un tournant dans la carrière de Welles: ce fut le dernier film qu'il tourna dans les années 40, son premier film en dehors du système des grands studios, sa première adaptation de Shakespeare ( suivront Othello et Falstaff qui mélange trois pièces), son premier film quasiment auto-produit, et ce sera le début du Welles "artiste maudit", obligé de composer avec des moyens ridicules, courant le cachet pour trouver de quoi financer des oeuvres accouchées dans la douleur, mais traversées de fulgurances géniales telles qu'elles demeurent des chefs d'oeuvres du 7è art.

lundi 1 septembre 2008

C 'est reparti pour une année ...

Je me disais bien qu'il y avait quelque chose de bizarre ce matin. Mon idiot de réveil tout d'abord qui, vexé sans doute d'avoir été mis sur pause pendant deux mois, s'est rappelé à mon (mauvais) souvenir en me réveillant aux aurores. Titubant dans le jour naissant, je découvre en ouvrant la fenêtre que le beau temps s 'est réveillé lui aussi! Pas de doute: fini ciel gris, finie la pluie, finies les veillées jusqu'au bout de la nuit, finies les vacances! c 'est la rentrée!... enfin , la pré-rentrée.

Le pas lourd, l'oeil encore brumeux et les épaules résignées j'empoigne mon sac à dos et sors affronter ce premier jour d'une année scolaire nouvelle. Heureusement le créateur, dans sa grande mansuétude, ne nous oblige pas à endosser de suite l'intégralité de notre bardas. La confrontation avec les nouveaux élèves, le matériel a transporter, les cours à préparer, tout celà viendra bien assez tôt! Non, aujourd'hui un bloc-notes et un stylo suffiront.

Nouveau bahut, nouveaux collègues, nouvelle salle des profs... échange de souvenirs de vacances pour les uns , de ragots pour les autres, à peine le temps de faire connaissance qu'il faut en troupeau rejoindre la salle polyvalente où le grand chef ( comme chaque grand chef avant et après lui dans chaque établissement scolaire) se doit de nous accueillir par un long et soporifique discours de bienvenue dont chacun attend fébrile la conclusion afin de prendre connaissance de son emploi du temps, qui pour aussitôt protester qui pour se moquer, plus ou moins discrétement, de ses collègues moins chanceux. Mais surtout, ce que personne ne raterait , c 'est le pot de bienvenue! pour une fois qu'on peut picoler aux frais de l'état on ne va pas se priver! ha, ça fait du bien par où ça passe! Jeanine! sa petite soeur!

... et après ça il y en a encore qui s'étonnent du nombre de profs alcooliques!

dimanche 31 août 2008

LA DAME DE SHANGHAI ( The Lady From Shanghai) Orson Welles 1947




Selon la légende, le Mercury Theater avait un besoin urgent de $ 55,000. Tombant par hasard sur le roman "The Man I Killed" de Sherwood King , Welles appela Harry Cohn, producteur à la Columbia ( qu'il connaissait bien , Rita Hayworth étant sous contrat avec ce studio) lui demandant d'en acheter les droits afin qu'il adapte , dirige et joue dans un film qui en serait tiré.
Pour la studio le coup de pub semblait juteux: la star maison ( qui venait tout juste de triompher dans Gilda) dirigée par son mari, génie maudit, dans un film noir , genre très à la mode à l'époque, tous les ingrédients semblaient réunis pour réaliser un véritable hold-up au box office.

Sauf que , encore une fois , les producteurs auraient dû se douter que Welles n'allait pas leur livrer le produit formaté qu'ils attendaient.

Tout d'abord, Welles et Hayworth étaient à l'époque en instance de divorce, autant dire que l'ambiance entre le réalisateur et la star étaient loin d 'être au beau fixe.

Premier choc: avant même le premier tour de manivelle Welles demande à Rita de couper son opulente et légendaire toison rousse et de se teindre en blond platine, et ce devant les caméras!

Ensuite, une bonne partie de l'action se déroulant sur un yacht, on loue celui d'Errol Flynn, qu'il pilotera d'ailleurs lui-même. Le tout bien sûr à grands frais ( quoi que la faute en incombe sans doute ici plus au studio qu'à Welles).

Enfin , le film , loin de magnifier la star, en fait une créature retorse et vicieuse, qui finit par agoniser au sol alors que le héros s'en va en lui tournant le dos.

Et pourtant...
On avait embauché Welles pour faire un film noir , et c 'est bien ce qu'il a fait. On y retrouve tous les ingrédients: l'intrigue tordue et labyrinthique, la femme fatale, le héros perdu au milieu de tout ça, l'action qui avance principalement de nuit au gré des meurtres qui éliminent graduellement le casting, jusqu'à la scène de séduction à base d'allumage de cigarette!Welles , sans doute encore marqué par son expérience brésilienne , applique aux scènes filmées sur le yacht et lors des arrêts picnic ( qui évoquent furieusement les picnics de Kane) sur la côté méxicaine les même techniques que celles utilisées pour It's All True, leur conférant un aspect documentaire. On sent sa jubilation lors des fabuleux numéros d'acteur de Glenn Anders ( Grisby) et de Everett Sloane (en mari outragé et avocat paralythique, déjà présent sur Citizen Kane), mais c 'est bien entendu la scène finale qui emporte tous les suffrages: la fameuse fusillade dans le labyrinthe de glaces, où chaque coup de feu fait voler en éclat les reflets des protagonistes, ainsi que, métaphoriquement , leurs masques.

Le studio , évidemment , n'apprécie pas vraiment ( c 'est le moins qu'on puisse dire) que l'on traite sa star maison de la sorte et , capitalisant sur le succès de Gilda, repousse la sortie de La Dame De Shanghai de un an , le temps pour les cheveux de la belle de repousser , afin qu'elle apparaisse dans toute sa splendeur pour la promotion du film. Le métrage, quant à lui , est sévèrement charcuté, puisque de 155 minutes il passe à 87, ce qui explique sans doute que certaines choses restent quelque peu floues ( les motivations réelles de Grisby par exemple).Cependant , en l'état La Dame De Shanghai reste un monument du cinéma, un des meilleurs films noirs jamais réalisés, et le deuxième chef d'oeuvre ( chronologiquement) de Welles.

samedi 30 août 2008

LE CRIMINEL ( THE STRANGER) Orson Welles 1946




Suite à ses mésaventures sud-Américaines, le contrat liant Welles à la RKO est annulé. Il tente pendant un temps de racheter les rushes qu'il a tournés pour achever son film , mais il se heurte au refus du studio. Plus personne ne voulant lui confier une caméra , il accepte quelques emplois d'acteur , dans une adaptation de Jane Eyre notamment. Sa vie privé se porte un peu mieux, puisqu'il épouse en secondes noces Rita Hayworth qui lui donnera une fille, Rebecca.

La guerre terminée, il se voit proposer par International Pictures la direction d'un film avec Edward G Robinson en chasseur de nazis débusquant un criminel de guerre, incarné par Welles lui même, dans une petite ville des Etats Unis. Impatient de tourner à nouveau, Welles accepte la commande et fait preuve d'une docilité exemplaire , répondant ainsi aux calomnies sur son caractère difficile et ses frasques de star. Il adapte le scénario à la virgule près et termine le tournage avec dix jours d'avance sur le plannning.

Si ce film a permis à Welles de retrouver le chemin des studios, artistiquement il est évident qu'il s'agit d'une oeuvre mineure pour son auteur, qui avouera que c 'est son métrage qu'il aime le moins, puisqu'il n'en a pas été l'initiateur. Cependant, commande ou pas, Welles est très appliqué, et on repère tout de même çà et là sa marque de fabrique: les scènes en plan-séquence, les contre-jours et les contre-plongées, celles-ci prenant tout leur sens lors de la scène finale sur le clocher/ horloge de l'église, qui n 'est pas sans rappeler, assez bizarrement , à la fois le Vertigo de Hitchcock et Retour Vers Le Futur :scratch: Même en réalisant un film de commande Welles trouve le moyen d'en faire une date dans l'histoire du cinéma, puisque Le Criminel est le premier film de cinéma à présenter des photos des camps de concentration.

Son plus grand mérite , cependant , aura été de faire réapparaître Orson Welles sur les agendas des producteurs, ce qui lui fournira l'occasion de réaliser le magnifique " Le Dame de Shanghai", avec sa future ex-femme.

vendredi 29 août 2008

IT'S ALL TRUE -Wilson /Meisel /Krohn d'après un film inachevé d'Orson Welles 1993



En 1942,peu après l'entrée en guerre des USA, et alors qu'il termine le tournage de La Splendeur Des Ambersons et de Voyage Au Pays De La Peur ( que la postérité attribuera à Norman Foster), Orson Welles est contacté par un certain Rockefeller, gros actionnaire de la RKO, afin de réaliser plusieurs films à visée propagandiste en Amerique du Sud pour renforcer l'unité panaméricaine. En bon patriote il accepte. Il doit au départ réaliser trois films: un au Mexique et deux au Brésil ( dont les sympathies du dictateurs de l'époque, Vargas, penchaient plutôt du côté de l'Allemagne nazie). Avant de partir , on lui promet qu'on lui enverra les rushes de ses films et une table de montage afin qu'il puisse les achever tout en tournant.Le tournage au Mexique avance bien , et il laisse à son ami Norman Foster le soin de terminer cette histoire d'amitié entre un jeune paysan et un taureau. Welles embarque donc pour le Brésil où il compte filmer le carnaval ( " autant capturer un ouragan " ). Ne sachant trop par quel bout prendre cette manifestation culturelle si étrangère à ce qu'il a connu jusqu'ici il se laisse peu à peu gagner par le rythme de la samba , et décide que le carnaval ne sera que le point de départ de son film , le sujet en devenant la samba et ses origines vaudoues. Dans le même temps il tombe sur un fait divers relaté dans le Times concernant l'odyssée de quatre pêcheurs du Nordeste , qui ont accompli un voyage de plus 2 500 km à bord de leur jangada ( bateau de pêche franchement pas équipé pour un voyage pareil) pour porter leurs doléances au président, et décide de tourner une reconstitution de cette aventure avec les vrais héros. Pendant ce temps, un changement de direction a lieu à la tête de la RKO et le nouveau président demande à voir comment est utilisé le million de dollars confié à Welles. On lui fait voir les rushes du carnaval ( sans le son), et ne comprenant pas pourquoi Welles a tenu à filmer ces noirs qui s'agitent il décide de lui couper les vivres et d'annuler le tournage. Welles, de son côté , est en pleine tragédie, puisque l'un des marins meurt lors du tournage. Il décide malgré tout de finir le film en hommage au disparu. Il se débrouille avec les 10 000 dollars et le peu de pellicule noir et blanc qu'il lui restait, espérant pouvoir monter et post-synchroniser son film une fois rentré. Malheureusement à son retour il apprend qu'il est remercié pour cause de gaspillage des finances du studio ( il va sans dire qu'on ne lui a jamais envoyé de table de montage pour finir ses deux films précédents) . Il tentera pendant plusieurs années de racheter le film, en vain. On a longtemps cru que l'intégralité des rushes avaient été détruits, jusqu'au début des années 80, peu avant la mort de Welles, où on retrouva quelques bobines dans un entrepôt de la Paramount. Il ne reste plus grand chose des images du carnaval et de l'histoire du petit garçon et de son taureau, par contre le segment sur les pêcheurs est à peu près complet, ne manque que le son. Le tout a donc été restauré, des bruitages et de la musique ajoutés, une présentation d'époque de Welles en personne intégrée, et des interviews des survivants du tournage complètent ce témoignage d'un film miraculé.

jeudi 28 août 2008

LA SPLENDEUR DES AMBERSONS- Orson Welles- 1942



Malgré l'echec commercial de Citizen Kane, RKO renouvelle sa confiance à Welles ( le contrat les liant portait de toute façon sur trois films), qui décide d'adapter le roman de Booth Tarkington lauréat du Prix Pulitzer en 1919, racontant les destins croisés et la rivalité de Eugene Morgan , pionnier de la production automobile , et de George Minafer, fils gâté de la femme qu'il aime mais auprès de laquelle il s 'est ridiculisé dans sa jeunesse, un enfant gâté qui finira par avoir ce qu'il mérite ( sa " comeuppance" en V.O ).

Le tournage se déroule sans problème, Welles retrouve ses amis du Mercury Theater : Joseph Cotten est Eugene, Agnes Moorehead est Fanny Minafer et pour la première et unique fois de sa carrière Welles n'apparaît pas dans un film qu'il dirige , il se contentera de faire la voix du narrateur.

C 'est lors de la post-production que les choses se gâtent. Welles est impliqué dans plusieurs projets parallèles et doit déléguer le montage à Robert Wise (déjà monteur sur Citizen Kane et futur réalisateur de West Side Story, Le Jour Où Le Terre S'arrêta et de Star Trek: Le Film), tandis qu'il part d'abord au Mexique puis au Brésil pour réaliser des films et des documentaires destinés à renforcer l'unité pan-Américaine au début de l'implication des Etats Unis dans la Seconde Guerre Mondiale.

Il tentera cependant de superviser les opérations par téléphone et par courier. Mais alors qu'il est en train de filmer le carnaval de Rio un changement de direction a lieu à la tête de la RKO, et le nouveau patron n'apprécie pas qu'on confie autant de moyens et de liberté à un réalisateur qui a fait perdre de l'argent au studio. Après avoir jeté un oeil sur la version de travail des Ambersons il décide que le film est trop long ( il dépasse alors les deux heures) et demande à Wise de le réduire de plus de 40 minutes. Malgré les protestations des collaborateurs de Welles, Wise est obligé de s'executer, ce que ne lui pardonnera jamais le réalisateur. Dans le même temps le financement des films sud-Americains de Welles est annulé ( pour se justifier la direction lancera une rumeur selon laquelle Welles aurait jeté l'argent par les fenêtres en Amerique du Sud et filmé des kilomètres de rushes inexploitables, une légende qui handicapera le réalisateur pour le reste de sa carrière).

Après toutes ces péripéties, que reste-t-il du film?Le métrage affiche 88 petites minutes, et l'histoire s'en ressent, parsemée qu'elle est d'éllipses parfois désarmantes ( surtout dans la deuxième partie). Cependant cela reste un film de Welles, immédiatement identifiable, notamment au niveau des éclairages, de l'utilisation de la profondeur de champs, des contre-plongées, des plans-séquences et des décors. Sans être aussi démonstratif que dans Citizen Kane , Welles fait étalage de tout son savoir-faire, et on ne peut que regretter que les scènes coupées soient perdues à jamais.

mercredi 27 août 2008

CITIZEN KANE- Orson Welles- 1941





Bien qu'âgé de seulement 26 ans, Orson Welles n'était pas un inconnu lorsqu'il débuta la production de ce qui resterait dans l'histoire comme le plus grand film de tous les temps. En fait il était même sacrément attendu au tournant. Metteur en scène de théâtre surdoué ( il était considéré comme un spécialiste de Shakespeare dès l'adolescence, et avait mis sur pieds une version ' vaudou' de Macbeth à Harlem, avec une distribution entièrement composée d'acteurs noirs), animateur de radio visionnaire ( son adaptation de " La Guerre Des Mondes " de H.G Wells avait terrifié une bonne partie de côte Est en 1938), il fut engagé par la RKO qui lui proposa un contrat tel qu' on n'en avait jamais vu jusqu'alors, et qu'on ne reverrait jamais ( surtout pour un premier film). Lui furent accordés carte blanche ( le fameux 'final cut' après lequel courent tous les réalisateurs travaillant pour un grand studio américain), une avance d'un million de dollars ( le budget d'une super production de l'époque, ce qui correspondrait à quelque chose comme 100 millions actuellement) le tout pour trois films sur lesquels il pouvait être scénariste, réalisateur, producteur, acteur ou tout celà à la fois!

Pour son premier long-métrage Welles envisageat tout d'abord une adaptation de Heart Of Darkness de Joseph Conrad ( le roman dont s'inspirera plus tard Francis Ford Coppola pour son Apocalypse Now), mais ses parti-pris artistiques, notamment son intention de filmer tout le métrage en caméra subjective pour coller à la narration à la première personne du roman, effraya les responsables du studio, d'autant que la guerre venait d'éclater en Europe, privant le film d'une carrière internationale, du moins sur le court terme. Les temps n'étaient guère favorables à des expérimentations aussi dispendieuses qu'incertaines. Après avoir tenté de mettre sur pied un thriller plus classique, Welles décida d'écrire, en collaboration avec Herman Mankiewicz ( le frère du futur réalisateur du Cléopâtre avec Liz Taylor) l'histoire d'un magnat de la presse, Charles Foster Kane, qui, bien qu'il ait tout ce qu'une fortune colossale permet d'obtenir, est en fait pathétiquement seul. Il meurt d'ailleurs dans la scène d'ouverture après un mystérieux dernier mot " Rosebud". Le film suit l'enquête d'un reporter chargé de déchiffrer " l'énigme Rosebud" , ce qui l'aménera à rencontrer toutes les personnes qui ont compté dans la vie de Kane.Si le synopsis n 'est pas vraiment révolutionaire, la mise en scène, elle, impressionne par son aspect novateur: construction en flash-backs, éclairages impressionistes, contre-plongées étourdissantes, jeux de miroir, profondeur de champs s'étendant à l'infini, sans oublier toute une nouvelle génération d'acteurs issus du Mercury Theatre de Welles ( Joseph Cotten et Agnes Morehead en tête), ainsi que la partition du musicien de la troupe , un certain Bernard Hermann, tout concourt à faire de Citizen Kane une date dans l'histoire du cinéma.

Mais c'était sans compter sur un certain William Randolph Hearst.Randolph Hearst était un magnat de la presse ( tiens donc?) qui prit ombrage du scénario, arguant qu'il s'agissait d'une critique personnelle ( alors que Welles avait bien précisé qu'il avait bâti son personnage à partir de nombreux éléments pris chez de nombreux entrepreneurs). Homme influent ( sans doute presque autant que le fictif Kane), Hearst entreprit de ruiner la réputation du film avant même sa sortie ( les fuites existaient déjà à l'époque), attaqua la RKO en justice, et tenta même de racheter le négatif du film afin de le brûler!Il n'obtint pas gain de cause, mais le mal était fait: malgré des critiques élogieuse, du moins dans tous les journaux n'appartenant pas à Hearst, le film fut un echec commercial qui contribua à discréditer durablement Orson Welles à Hollywood.

mardi 26 août 2008

Metallica Rock En France Arras 14 août 2008

Tout d'abord un gros coup de gueule! Pas envers Metallica bien sûr, les Four Horsemen se sont toujours distingués par le grand respect qu'ils vouent à leurs fans, non ce coup de gueule est dirigé vers les organisateurs du festival! Je n'ai jamais vu une pagaille pareille! Bien qu'arrivés devant les grilles plus d'une heure avant l'heure prévue pour le premier concert ( Gojira) il nous aura fallu plus de deux heures pour enfin poser le pied sur le pavé de la place d'Arras, la faute à une organisation d'un autre monde. Plus d'une heure et demi nous aura été nécessaire pour passer une première barrière, où l'on aura vérifié nos tickets, où l'on aura été fouillés et surtout où ceux qui avaient eu la mauvaise idée d'apporter une bouteille ( en verre , en plastique , en carton , d'alcool , de bière,de soda, de jus de fruit ou même de malheureuse eau du robinet) se la sont vue confisquer et vider sous leurs yeux dans le caniveau! Mais ce n'était là que la première partie d'un véritable parcours du combattant; en effet, 20 mètres plus loin une deuxième barrière nous arrêtait encore pour un bon quart d'heure ( elle ne servait à rien , juste à nous arrêter) et enfin une dernière barrière juste avant l'entrée sur la place où l'on fut de nouveau contrôlés et fouillés ( des fois qu'on aurait pu passer sans ticket au premier contrôle ou qu'on aurait sorti une boutanche d'un chapeau entre temps).La raison de ce cirque ne tarda pas à nous sauter aux yeux une fois dans la place ( ou sur la place , c 'est selon): contrairement aux amateurs de musique plus conventionnelle, il semble que le fan de heavy metal soit bourré de thunes, car tout avait été mis en oeuvre pour lui soutirer un max de brouzoufs: si on veut manger il faut acheter sur place, si on veut boire il faut acheter sur place ( et uniquement de la Heineken! ) et si on a envie de pisser il faut encore débourser( et accessoirement faire la queue pendant trois bons quarts d'heure!), si bien que juste avant le Main Event tout le monde pissait n'importe où Avec toutes ces conneries nous n'avons donc pas pu assister au concert de Gojira , groupe que je ne connaissais pas mais dont on m'avait dit le plus grand bien. Alors que quelques gouttes de pluie nous obligeaient à sortir le parapluie ( depuis le début de l'"été" on est habitués) les hollandais de Within Temptation montaient sur scène pour une prestation honnête ( surtout la chanteuse), mais guère originale, leurs schémas musicaux se révélant répétitifs et prévisibles de morceau en morceau ( intro bourrine, premier couplet plus doux, passage au piano obligé), ce qui est dommage car les musiciens assurent vraiment et la chanteuse est charmante, le son était très bon ... la chanteuse très jolie.... je vous ai dit que la chanteuse était mignone ?

http://fr.youtube.com/watch?v=0GbO0XdWGKY&feature=related

Alors que la nuit tombait, que les nuages s'étaient dissipés, Metallica investissait enfin la scène, et histoire de montrer à tout le monde qui c'était Raoul ( et aussi de justifier le prix du billet) d'attaquer d'entrée par un tiercé de classiques de la grande époque:

http://fr.youtube.com/watch?v=Q7Qy6MeOKuc&feature=related

un Creeping Death des familles pour mettre dans l'ambiance ( entendre tout un public hurler "Die, Die, Die" me fiche toujours des frissons dans le dos, et quand la frangine ajoute un " Motherfucker Die!" je sais que je n'ai pas perdu ma journée ), suivi d'un For Whom The Bell Tolls, qui permit à Robert Trujillo de faire résonner sa basse et enfin un Ride The Lightning d'anthologie clotura ce premier assaut.

http://fr.youtube.com/watch?v=wNzD7CJFPaY&feature=related

A ce moment , James decida de tester le public. Après tout il y a les "so-so " Metallica fans, et les "Dedicated" Metallica fans, et il fallait bien qu'ils voient à qui ils avaient affaire en ce jour! ainsi laissa-t-il au public le soin de chanter les refrains de The Memory Remains ( pour ma part j'ai chanté, ou plutôt hurlé, tout le long du concert , mais j'étais trop loin il m'a pas vu , par contre j'ai mis trois jours à récupérer ma voix!) et de Sanitarium. Le public d'Arras ayant visiblement réussi le test, les américains se dirent que nous méritions une petite récompense , et nous offrirent en avant première un morceau de Death Magnetic intitulé Cyanide: grosse intro d'un Trujillo arc-bouté sur sa basse, vite rejoint par un beat bien bourrin de Lars, rythmique "Ran-cran-cran" caractéristique, solo enlevé de Kirk, c 'est définitivement du Metallica pur jus, même si l'ensemble a semblé un rien brouillon; il faudra attendre le 12 septembre pour se faire une idée plus précise, mais en tout cas ça sonne déjà bien mieux que du St Anger!A peine le temps de digérer le nouveau morceau qu'un monument deferle sur la place d'Arras:

http://fr.youtube.com/watch?v=O4eQSEjGuOw

...And Justice For All! version intégrale! dix minutes de folie furieuse, de riffs hautement techniques et parties de batterie impossibles! pas le temps de respirer, les californiens envoient No Remorse et la foule n 'est plus qu'une immense masse grouillante de têtes qui headbanguent et de bras levés.Soucieux d'éviter des morts par épuisement, James &co calment le jeu avec un Fade To Black de toute beauté avant de revenir à la charge avec un Master of Puppets (aussi en intégralité et dont les solos sont repris en coeur par la foule)

http://fr.youtube.com/watch?v=f3WM90dWgGc&feature=related

suivi de près par un Whiplash stratosphérique ( là impossible de fredonner les soli!).Place ensuite à un petit moment de douceur dans le monde de brutes du thrash metal , avec un Nothing Else Matters

http://fr.youtube.com/watch?v=SStK_qoZMPE&feature=related

entonné de bout en bout par le public, un public qui sera d'ailleurs très étonné , et enchanté aussi bien sûr, par la nouvelle intro de Sad But True, a capella, où ses talents vocaux seront une fois de plus mis à contribution. Mais voilà que retentissent les explosions et rafales de mitraillettes qui annoncent One ( et qui auront sans doute fait perdre quelques points d'audition aux personnes présentes!)

http://fr.youtube.com/watch?v=I3BWZ8SQjKI&feature=related

l'occasion pour la petite soeur, le frangin et votre serviteur de s'égosiller en choeur sur le break final alors que des feux d'artifice illuminent la nuit du Pas de Calais. Sans aucune pitié, décidés à mettre tout le monde K.O debout, les Four Horsemen lâchent alors le riff reconnaissable entre tous de l'hymne ultime de la scène Metal tandis que Trujillo arpente la scène à moitié accroupi ( ce type a des cuisses d'acier!), Enter Sandman concluant de manière magistrale une prestation anthologique.

http://fr.youtube.com/watch?v=TLoIXM5_y70&feature=related

Histoire d'achever les survivants, le groupe revient sur scène pour les rappels, James s'amusant à faire croire que chaque chanson est la dernière ( s'exposant chaque fois à des huées réprobatrices) ou jouant avec les caméras qui retransmettent sur les écrans géants ses moindres mimiques ( surtout celles de ses doigts ). Sont donc assenées avec la délicatesse d'une hache en pleine tête les reprises Last Caress et So What, avant que le Seek And Destroy obligatoire (sur le refrain duquel chacun est invité à se déchirer les poumons tandis que Trujillo fait la toupie)

http://fr.youtube.com/watch?v=AxbCwBdqUM8&feature=related

ne vienne cloturer le concert pour de bon, laissant la foule exangue et repue s'en retourner le pas lourd, les yeux brillants et les oreilles tintantes.